Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
31 octobre 2009 6 31 /10 /octobre /2009 17:55
Il fait terriblement beau, dehors ; le vent agite les feuilles ensoleillées. La lumière éblouit les immeubles, qui ont l’air de plisser les yeux. Et mes doigts dégoulinent, toujours plus profond au fond de ma gorge. 
Peu importe l’heure du jour et de la nuit, il faut vomir. Il faut remplir, vider, salir, laver, utiliser, puis ranger. 
Puisque je suis incapable d’arrêter de manger, il faudra tout vomir, jusqu’à la plus infime fourchette de haricots verts. Dans mes toilettes, et dans les toilettes des autres –de tous les porcs qui me forceront à manger chez eux-, et dans les toilettes des cafés, des restaurants, du lycée ; dans la douche, dans les lavabos, dans ma poubelle, dans le sceau, les sacs en plastique. Je vais infecter chaque endroit où je passe, chaque endroit où je vais, le marquer comme au fer rouge du vêtement de ma souffrance, de mon dégoût, de ma révolte –l’inonder de mon vomi. Y éparpiller mes entrailles. Avec ce sourire jouissif et victorieux que mon pouvoir m’arrache à la fenêtre, quand je tiens d’une main tremblante une cigarette, quand mon cœur bat si vite que mon corps n’arrive pas à suivre, et quand je détiens en secret le contrôle sur mon corps.
Même si tout ça passe inaperçu. Moi, je saurai. Je saurai que mon vomi a parcouru leurs tuyaux, qu’il a souillé leurs petits intérieurs bourgeois, et le mien. Je saurai que je suis passée par là.

Je me dégoûte, me révulse ; je ne veux plus jamais regrossir de ma vie. C’était la dernière fois, et elle a très vite été étouffée. Pas que je me sois étranglée avec mon vomi –jamais de la vie. J’avais juste oublié, un peu, que c’était si facile. Une petite heure de remplissage contre dix à quinze minutes pour effacer la catastrophe.
Il reste encore quelques kilos, séquelles de ces jours d’abandon, mais je les ferai rapidement disparaître ; puisque les princesses ne vomissent pas, je suis une sorcière. Et les sorcières ont des pouvoirs magiques.
Je crois à la reconversion des sorcières en princesses. Mais pour le moment, je crois que je n’ai pas la force. Je suis encore toute collante et salie, et trop marquée par les habitudes boulimiques pour m’en défaire d’un coup. 

Vomir, encore et encore, l'angoisse qui me noue les tripes, à nouveau, deux, trois fois par jour. Cette angoisse inépuisable mais épuisante, générée par tout mouvement, toute pensée, toute considération involontaire de ce vide environnant, cette angoisse nourre sans cesse par les mots, les promesses, les échéances, les envies. Cette angoisse que me colle à la peau et que seul le vide dément qui occupe mon estomac pendant un quart d'heure après la crise parvient à apaiser.
Je crois que toutes les décisions que je prends sont vouées à l'échec; ne plus jamais vomir, et les toilettes, les lavabos, les sacs en plastique débordent. Ne plus jamais manger, et les placards se vident à une vitesse impressionnante. J'ai dû être confectionnée à l'envers.
Je devrais décider de grossir à l'infini, de peser 70 kg d'ici le 1er Décembre, de devenir sumo <3 OUI, c'est ma vocation.


A part ça, J. est enceinte et elle a eu la grippe A. Ca fait des bébés schizofrènes, ces choses là. :)


Partager cet article
Repost0

commentaires

Cendrier

Aujourd'hui est un jour à s'étrangler avec des smarties,
et à y succomber.